86eme étape Campagnano di Roma - La Storta 24km Premiers 2000

Nous avons l'habitude, lorsque nous arrivons dans un accueil de pèlerins, de mettre nos chaussures ailleurs que dans la chambre. Et hier, à Campagnano, il y avait une magnifique terrasse extérieure à côté de notre chambre. C'est donc sur la terrasse que nous les avons laissées s'aérer.

En plein milieu de la nuit, vers 2h, un orage éclate, une pluie torrentielle tombe et nous réveille. Que c'est agréable d'entendre la pluie lorsque l'on est bien au chaud, bien au sec ! Et tout à coup, Jean-Jacques bondit de son lit : les chaussures ! Il file sur la terrasse, ne les trouve pas :

- Agnès, les chaussures ?

- Quoi les chaussures ? Je les ai rentrées hier au soir...

Ce matin, au départ, il pleut encore. Le serveur du bar où nous prenons notre petit-déjeuner consulte pour nous son "smartphone" et nous annonce que vers 9-10h la pluie cessera. Et comme pour Josué avec le soleil, la pluie s'est arrêtée à cette heure-là.

A 25km à vol d'oiseau du Vatican, nous étions en pleine campagne. Nous avons même traversé un pacage pour animaux où ceux-ci pouvaient circuler librement. Nous y avons vu une race de vaches, la Maremmana dont la forme des cornes a certainement inspiré Salvator Dalí pour tailler ses moustaches. C'est une race extrêmement rustique, antique même pour certains. Les vaches se satisfont de conditions extrêmes, de terres arides et de sécheresse = des suceuses de cailloux !

Ce soir nous sommes accueillis chez les Petites Soeurs des Pauvres de la Storta. Nous avons eu une petite frayeur en arrivant car un groupe d'une trentaine de jeunes occupait les lieux. Par chance, ils partent en milieu d'après-midi, nous laissant un peu de place pour dormir nous deux et Julia (une jeune Hongroise qui marche avec nous depuis hier matin).

Mais déjà nous sommes dans l'étape de demain, la der des der...

C'est un mélange curieux de sentiments que nous vivons, à la fois, de hâte et d'impatience, mais aussi de regret de voir une si magnifique expérience s'achever, un peu d'angoisse aussi sur notre capacité à replonger dans le monde. On prend vite l'habitude du silence, du grand air, du beau, du bon, du bien, de la contemplation.

Peut-être faut-il ce type d'expérience pour comprendre ceux, religieux et religieuses, qui font ce choix pour toute leur vie.

Et déjà le bruit de la ville, la circulation automobile sont là et ne nous quitteront plus.

Nous avons fait les calculs ce matin, c'est à 11h que nous franchirions la barre fatidique. Entre-temps, sur la route, nous avons rencontré un jeune Espagnol qui partait pour Compostelle. Curieuse association : ceux qui sont à une journée de l'arrivée d'un long périple et celui qui n'a réalisé que la première journée de son long périple.

Julia nous attendait sur la route. Nous avons partagé nos biscuits, pruneaux et "cantuccini" et elle a pris la photo des deux vieux se préparant à devenir de parfaits romains et s'entraînant à l'écriture romaine de leurs deux mille kilomètres.

Demain Rome.